Pourquoi Miami est-il le seul véritable vainqueur du départ de Dwyane Wade à Chicago ?
Ce que tout le monde considérait comme inimaginable a fini par se produire : après 13 ans passés en Floride, Dwyane Wade a quitté Miami pour Chicago. Le Heat se retrouve désormais orphelin de son plus grand joueur, celui qui est sans conteste sa figure incontournable. Pourtant, nous sommes convaincus que la franchise de South Beach a en fait tout à gagner dans ce mouvement...
Un terrible été s'annonçait pour Pat Riley en Floride : le mythique General Manager de Miami devait ainsi faire face à la multitude de joueurs en fin de contrat au sein de son équipe (Hassan Whiteside, Joe Johnson, Luol Deng, Tyler Johnson, Amar'e Stoudemire, etc.) tout en faisant le nécessaire pour la renforcer (Riley avait fait de Kevin Durant sa priorité, avec la réussite que l'on sait). À cela s'ajoutaient les incertitudes concernant l'état de santé de Chris Bosh, qui a manqué 67 matches au cours de ces deux dernières saisons en raison de caillots sanguins trouvés dans son corps, et la prise en compte du cap salarial, fixé à 94.14 M$.
Au final, le Heat est parvenu à prolonger le contrat de son pivot Hassan Whiteside au prix fort (plus de 98 M$ sur quatre ans), mais a dû se résoudre à laisser filer ses deux ailiers vétérans, Luol Deng et Joe Johnson (chez les Lakers pour le premier, au Jazz pour le second). Quant à Tyler Johnson, son avenir se situe entre Brooklyn, qui lui a formulé une offre de 50 M$ sur quatre ans, et Miami, qui a, à compter d'aujourd'hui, jusqu'à dimanche pour l'égaler.
Au milieu de tout cela était presque oublié Dwyane Wade. Figure emblématique de la franchise floridienne depuis maintenant 13 ans, celui-ci voyait à son tour son contrat arriver à son terme avec son équipe de toujours. Tout portait à croire que « D-Wade », trois fois champion avec Miami, ne revêtirait pas un autre uniforme que celui du Heat la saison prochaine, ni même jusqu'à la fin de sa carrière. Pourtant, les apparences sont parfois trompeuses...
Dwyane Wade s'est en effet engagé avec les Bulls pour un contrat s'élevant à 54 M$ sur deux ans, fait absolument improbable pour une grande partie du monde de la NBA, spécialistes comme fans. Il se murmure ici et là que « Flash » n'aurait que modérément apprécié que son dossier passe après celui de Hassan Whiteside et de Kevin Durant sur le bureau de Pat Riley. Ce dernier lui a tout de même offert 40 M$ sur deux ans. Wade, exigeant, refusa : il voulait plus, en termes d'argent comme de durée. Ainsi, il discuta avec les Bucks et les Nuggets, qui pouvait répondre à ses attentes sur le plan salarial mais qui ne présentaient pas de réelles garanties sportives. Il fut un temps question des Cavaliers, où Wade aurait rejoint son grand copain LeBron James, avec lequel il fut sacré champion à deux reprises, en 2012 puis en 2013, du côté de South Beach. Cleveland n'avait cependant pas les moyens de les réunir. Malgré tous ces signaux négatifs, il nous paraissait encore improbable qu'il quitte Miami...
En fin de compte, c'est bien pour Chicago que Dwyane Wade évoluera la saison prochaine. L'intéressé justifie ce choix - qui suscite l'incompréhension de la NBA toute entière ou presque - par le fait qu' « [il] ait grandi avec les Bulls » et que « ça l'a inspiré dès son plus jeune âge à poursuivre son rêve de devenir un basketteur professionnel. (...) Je n’ai jamais oublié d’où je viens et je suis reconnaissant d’avoir l’opportunité de jouer pour la franchise qui a attisé ma passion pour ce sport. » On a cependant du mal à décerner autre chose qu'un choix motivé par la fierté, voire l'argent, chez Dwyane.
Frustré de ne pas être la priorité de ses dirigeants, qui ont refusé de lui offrir les sept millions supplémentaires qu'il réclamait, il rejoint donc Chicago, ville dans laquelle il est né et a été élevé. Wade a peut-être du mal à accepter qu'un joueur comme Chandler Parsons, qui passe le plus clair de son temps à l'infirmerie et donc loin des parquets, se voit offrir le pactole (94 M$ sur quatre ans) par Memphis, et qu'un meneur de jeu qui n'a jamais été sélectionné pour l'All-Star Game tel que Mike Conley soit traité comme un roi par ces mêmes Grizzlies, qui lui verseront 153 M$ sur les cinq prochaines années. En voulant satisfaire son ego, il oublie peut-être que le Heat lui a déjà donné près de 160 M$ depuis le début de sa carrière, en 2003, et que des légendes telles que Dirk Nowitzki et Tim Duncan renoncent chaque années à des millions de dollars pour permettre à leur dirigeants de bâtir une équipe davantage compétitive.
Sportivement, sa décision laisse songeur : quels sont en effet les plans des Bulls ? La franchise de l'Illinois reste une saison bien terne, qui l'a écarté des playoffs pour la première fois depuis 2008. Après avoir renvoyé l'été dernier son entraîneur, Tom Thibodeau, spécialiste défensif unanimement apprécié par ses joueurs mais beaucoup moins par ses dirigeants, Gar Forman, le General Manager de « Chitown », avait confié les clés de l'équipe à Fred Hoiberg, coach universitaire sans la moindre expérience de la NBA dans l'espoir qu'il transmette sa culture offensive aux Bulls. Le résultat fut loin d'être à la hauteur des attentes, puisque Chicago s'est égaré en défense, son point fort du temps de Thibodeau (103.2 points encaissés par match cette saison, 15ème en NBA, contre 97.8 l'an passée, 9ème), sans vraiment s'améliorer en attaque (101.7 avec Hoiberg, 18ème, contre 100.8 avec Thibodeau, 15ème). Surtout, il est passé du statut de candidat aux Eastern Conference Finals à celui d'équipe non-qualifiée pour les playoffs.
Au terme d'une saison décevante bouclée avec 41 victoires et autant de défaites et une neuvième place peu flatteuse, « Windy City » a vu s'envoler trois joueurs cadres de son équipe : Derrick Rose et Joakim Noah ont tous les deux rejoint les Knicks tandis que Pau Gasol a pris la direction des Spurs. Pour compenser ces pertes, les Bulls se sont attachés les services de Rajon Rondo, indésirable à Sacramento, et de Robin Lopez, transfuge de New York. Cela semblait insuffisant pour encadrer le seul Jimmy Butler, et l'arrivée de Dwyane Wade suscite de nombreuses interrogations : qui de Rondo, de Butler ou de Wade débutera les matches sur le banc ? Qui apportera de l'adresse extérieure, domaine dans lequel Wade et Rondo sont loin d'exceller ? Que visent les Bulls ? Néanmoins, la question qui revient avec le plus d'insistance est la suivante : quel est l'intérêt pour Chicago de payer un joueur de 34 ans 27 M$ par an ? On ne comprend effectivement pas ce qui a poussé les dirigeants de la franchise six fois championne de NBA à proposer autant d'argent à un joueur certes très brillant et toujours capable de prendre un match à son compte, mais proche du déclin et régulièrement sujet aux blessures (102 matches ratés ces cinq dernières années). De plus, Wade évolue au même poste que Butler, sur lequel était censé reposer les espoirs de la franchise dans les années à venir...
Le Heat va désormais devoir composer sans son joueur phare, celui qui incarnait à merveille l'image de la franchise floridienne. Toutefois, le départ de Wade est un bien pour un mal. Impatient, il est allé au plus offrant ; capricieux, il a tourné le dos qu'il a porté et qui l'a porté pendant 13 ans, tirant un trait sur son incroyable héritage à Miami. Offrir 20 M$ sur deux ans à un joueur trentenaire dont la santé est fragile présentaient déjà un risque ; lui en donner 27 alors qu'il ne restait que peu d'argent dans la masse salariale pour recruter une demi-douzaine de joueurs relevait du suicide. « Très triste », Pat Riley dispose malgré tout d'un aura et d'un génie qui devraient permettre au Heat de très vite redevenir compétitif. Après tout, n'était-ce pas celui qui avait convaincu Shaquille O'Neal de rallier la Floride pour remporter le championnat en 2006 ? N'était-ce pas lui qui avait persuadé LeBron James et Chris Bosh de rejoindre South Beach pour régner outrageusement sur l'Eastern Conference pendant quatre ans, avec à la clé deux titres, en 2012 et en 2013 ? Dernièrement, Riley a eu le flair de drafter deux rookies, Justise Winslow et Josh Richardson, qui n'ont pas attendu d'être sophomores pour faire montre de leur talent. C'est aussi lui qui a accordé sa confiance à Hassan Whiteside, pivot passé par neuf équipes différentes - dont des clubs chinois et libanais - avant d'exploser en Floride. Enfin, Pat Riley est celui qui a maintenu en place Erik Spoelstra après la défaite lors des Finals en 2011 contre Dallas (2-4), alors que tout le monde considérait qu'il n'était pas assez expérimenté ni apte à entraîner à un tel niveau de compétition des stars comme LeBron James, Dwyane Wade et Chris Bosh.
Les départs de Dwyane Wade, de Luol Deng et de Joe Johnson offrent un tas de possibilités à Miami, qui va pouvoir laisser Josh Richardson, Justise Winslow et Tyler Johnson - s'il reste - développer leur potentiel. En attendant que les doutes sur l'état de santé de Chris Bosh ne soient levés, Hassan Whiteside sera appelé à prendre davantage de responsabilités. Pat Riley, qui nous a habitué aux bons coups, pourrait rapidement convaincre de grands noms de venir briller en Floride (Russell Westbrook ? Paul Millsap ? Rudy Gay ? Jeff Teague ?) tout en multipliant les recrutements de joueurs sous-estimés à moindre coût.
Les Bulls, quant à eux, offrent le jackpot à un joueur qui prend de l'âge et dont ils n'avaient pas spécifiquement besoin, et ajoutent une nouvelle décision inconsidérée à une collection déjà bien remplie.
Dwyane Wade, pour finir, quitte une franchise dont il est et sera pour longtemps encore le visage incarné, à cause d'une crise d'égocentrisme et de quelques millions de dollars. Il rejoint une organisation sans ligne directrice au projet flou alors qu'il pouvait viser mieux dans son équipe de toujours. Son nom restera à jamais ancré dans l'histoire du Miami Heat - et vice-versa -, mais il est dommage que cette page se referme sur un chapitre aussi peu loyal, qui ne peut qu'écorner la légende d'un joueur formidable.
Sami
@IAmSami25
Expert NBA
Team Who's The Bet
Post a Comment